Paul Delvaux, subversif malgré lui
Au début des années 1970, en pleine période révolutionnaire et féministe, le peintre des rêves et des femmes, Paul Delvaux, devient le représentant de l’art belge du XXᵉ siècle. Son œuvre embrasse les désirs d’émancipation d’une jeunesse qui rejette une société sclérosée. A l’opposé de son éducation bourgeoise, le peintre belge s’invente à partir de 1930 un monde personnel, subversif, dans lequel il bouscule l’ordre établi, se joue du temps et de l’espace.
Séduit par le surréalisme, Paul Delvaux explore ses rêves sans aucun tabou. Il connaît à plusieurs reprises la censure quand il peint une descente de croix avec des squelettes, ou une annonciation transgressive. Au cœur de son univers, la femme, puissante, inaccessible et mystérieuse sous des clairs de lune, dans des décors de gares, des villes antiques. Cette obsession pour la féminité dérange ? Il la décline à l’infini, l’associe à des symboles sexuels (trains, tunnels, arbres), évite habilement toutes polémiques et ²explications, ne souhaite que la sublimer.
Paul Delvaux pousse à l’extrême le pouvoir de choquer et de bouleverser. Il piège notre regard et nous interroge sur notre imaginaire, la solitude contemporaine, l’incommunicabilité entre hommes et femmes, notre limite à accepter la nudité. Même son personnage de peintre à l’allure androgyne intrigue.
Derrière une existence apparemment banale, Paul Delvaux est animé d’une volonté farouche de demeurer inclassable.
Paul Delvaux, La Conversation, 1944
© Foundation Paul Delvaux, St. Idesbald, Belgium/SABAM, 2022